Quisieras poder deten­erte, para deten­erte en algo. Pero ¿hay algo que puede deten­erse, para deten­erte en algo?

Tu voudrais pou­voir t’arrêter, pour t’arrêter dans quelque chose. Mais y a‑t-il quelque chose qui puisse s’arrêter, pour que tu t’arrêtes dans quelque chose ?

 

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Ser es obligarse a ser. Y obligarse a ser es obligarse a ser. No es ser.

Être, c’est s’obliger à être. Et s’obliger à être, c’est s’obliger à être. Ce n’est pas être.

 

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No, las cosas no son como son, porque si fue­sen como son, lo serían siem­pre como son.

Non, les choses ne sont pas comme elles sont, parce que si elles étaient comme elles sont, elles le seraient tou­jours, comme elles sont.

 

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Sabes que te equiv­o­caste ; y si supieras tam­bién que te equiv­o­cas y si supieras tam­bién que te equiv­o­carás, sabrás tan­to cuan­to sé yo.

Tu sais que tu t’es trompé ; et si tu savais aus­si que tu te trompes, et si tu savais aus­si que tu te tromperas, tu en saurais autant que moi.

 

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Y su dolor llegó a ser infini­to, de tan­to no alcan­zar para nada su dolor.

Et sa douleur en vint à être infinie, à force de ne pas tenir pour rien sa douleur.

 

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Estar en com­pañía no es estar con alguien, sino estar en alguien.

Être en com­pag­nie, ce n’est pas être avec quelqu’un, mais être en quelqu’un.

 

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A veces una pal­abra que parece de más no está de más, porque acompaña.

Par­fois un mot qui paraît de trop n’est pas de trop, parce qu’il accompagne.

 

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Y si eres un san­to porque eres un san­to, eres un san­to que no vale nada, porque no te cues­ta nada el ser un santo.

Et si tu es un saint parce que tu es un saint, tu es un saint qui ne vaut rien, parce que ça ne te coûte rien d’être un saint.

 

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Cuan­do creo enten­der un poco qué es la vida, la vida no es ni un misterio.

Quand je crois com­pren­dre un peu ce qu’est la vie, la vie cesse d’être un mystère.

 

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Si me acer­co a ellos con­mi­go, me acer­co a ellos ; y si me acer­co a ellos con ellos, me ale­jo de ellos.

Si je m’approche d’eux de mon fait, je m’approche d’eux ; et si je m’approche d’eux de leur fait, je m’éloigne d’eux.

 

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Los que se lev­an­tan para lev­an­tarse y no para lev­an­tar, no com­pren­do por qué se levantan.

Ceux qui s’élèvent pour s’élever et non pour élever, je ne com­prends pas pourquoi ils s’élèvent.

 

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Me miras como si me dijeras : no te doy nada. Y te lamen­tas, porque te miro como si te dijera : no quiero nada.

Tu me regardes comme si tu me dis­ais : je ne te donne rien. Et tu te désoles, parce que je te regarde comme si je te dis­ais : je ne veux rien.

 

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Estás solo, total­mente solo, y tienes miedo. ¡Oh, quién comprende!

Tu es seul, com­plète­ment seul, et tu as peur. Allez comprendre!

 

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Sólo quien vive murien­do puede resolver sus problemas.

Il n’y a que celui qui vit en mourant qui peut résoudre ses problèmes.

 

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Nadie te lla­ma pobre. Es que nadie te quiere.

Per­son­ne ne t’ap­pelle “mon pau­vre”. C’est que per­son­ne ne t’aime.

 

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Eso que lla­man nada debe ser lo mejor, porque lo mejor del hom­bre se ali­men­ta de eso que lla­man nada.

Ce qu’on appelle rien doit être le meilleur, parce que le meilleur de l’homme se nour­rit de ce qu’on appelle rien.

 

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Vemos hom­bres y hom­bres y hom­bres casi siem­pre, y sólo algu­na vez vemos un hombre.

Nous voyons des hommes et des hommes et des hommes presque tout le temps, et quelque­fois seule­ment nous voyons un homme.

 

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El val­or de cuan­to tienes y de cuan­to no tienes se hal­la en cuan­to te fal­ta, de cuan­to tienes y de cuan­to no tienes.

La valeur de tout ce que tu as et de tout ce que tu n’as pas se trou­ve dans tout ce qu’il te manque de tout ce que tu as et de tout ce que tu n’as pas.

 

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El hom­bre, como está hecho, ¿puede ser el gran hom­bre? No. Y el gran hom­bre, si existe, no debiera lla­marse hombre.

L’homme, comme il est fait, peut-il être le grand homme? Non. Et le grand homme, s’il existe, ne devrait pas s’ap­pel­er homme.

 

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Has ven­ci­do a tu grande dolor. Pero con otro más grande dolor. Y lo has ven­ci­do siem­pre, porque no te ha fal­ta­do nun­ca otro más grande dolor.

Tu as vain­cu ta grande douleur. Mais au moyen d’une autre douleur plus grande. Et tu l’as tou­jours vain­cue, parce que tu n’as jamais man­qué d’autre douleur plus grande.

 

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Si te sal­vas de todo, te pierdes en nada. Si no te sal­vas de nada, te pierdes en todo. Porque de todos mod­os debes perderte. Y si de todos mod­os debes perderte, piérdete en todo.

Si tu te sauves de tout, tu te perds dans rien. Si tu ne te sauves de rien, tu te perds dans tout. Parce que de toutes façons tu dois te per­dre. Et si de toutes façons tu dois te per­dre, perds-toi dans tout.

 

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La estrel­la y el insec­to. Nada más. Para la estrel­la el insec­to y para el insec­to la estrel­la. Y nadie quiere ser el insec­to. ¡Qué extraordinario!

L’é­toile et l’in­secte. Rien d’autre. Pour l’é­toile, l’in­secte et pour l’in­secte l’é­toile. Et per­son­ne ne veut être l’in­secte. Comme c’est extraordinaire !

 

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Son mor­tales los sí de los sí y los no de los no. Y no son mor­tales los sí de los no y los no de los sí.

Sont mor­tels les oui des oui et les non des non. Et ne sont pas mor­tels les oui des non et les non des oui.

 

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No me hacías el mal de cien años has­ta hace un min­u­to. Falta­ba un min­u­to, un min­u­to que había fal­ta­do cien años. Un min­u­to que no quiso fal­tar un minuto.

Tu ne me fai­sais pas le mal de cent années jusqu’à il y a une minute. Il man­quait une minute, une minute qui avait man­qué cent années. Une minute que je n’ai pas voulu man­quer une minute.

 

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Creo que el movimien­to es el no saber, porque se mueven más los de menor saber.

Je crois que le mou­ve­ment est le non-savoir, parce que bougent davan­tage ceux qui ont le moins de savoir.

 

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Si crees que no tienes nada para ofre­cer, a nadie, creo que no deseas ver a nadie.

Si tu crois que tu n’as rien à offrir, à per­son­ne, je crois que tu ne désires voir personne.

 

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Muchas pal­abras, mon­tañas de pal­abras. Y amar es una sola pal­abra. ¡Qué poco es amar!

Beau­coup de mots, des mon­tagnes de mots. Et aimer est un seul mot. Que c’est peu de chose, aimer!

 

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No digo mal de ti, ¡oh, no! Digo que me estás matando.

Je ne dis pas de mal de toi, oh non! Je dis que tu es en train de me tuer.

 

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Me das todo lo que puedes, pero sin nada de lo que no puedes. Me das un cuer­po sin alma.

Tu me donnes tout ce que tu peux, mais sans rien de ce que tu ne peux pas. Tu me donnes un corps sans âme.

 

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Hay un cuan­do que me muero que es cuan­do estoy ante lo bel­lo ; hay un cuan­do que me mato que es cuan­do estoy ante lo feo, y hay un cuan­do que no me muero ni me mato que es cuan­do estoy ante lo tonto.

Il y a un moment où je me meurs, c’est quand je suis devant ce qui est beau ; il y a un moment où je me tue, c’est quand je suis devant ce qui est laid ; et il y a un moment où ni je ne me meurs ni je ne me tue, c’est quand je suis devant ce qui est sot.

 

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traduit de l’es­pag­nol (Argen­tine) par Danièle FAUGERAS

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