Muriel Augry, Suite parisienne, extraits

Par |2024-03-07T06:20:39+01:00 6 mars 2024|Catégories : Muriel Augry, Poèmes|

 

Les lucarnes se hissent sous le ciel safran
A l’angle droit elles embrassent les nuages
De l’ angle gauche elles chahutent les écharpes de vent

Un cor­don ruti­lant serpente
nar­gue les bâtisses
His­toires croisées
sous l’œil clé­ment de la basilique

Les badauds se frô­lent dans l’île de convoitise
en vagues séculaires
Le temps s’effiloche
au gré des déambulations
Sous le ciel safran

La dame bleue

La Seine joue sous les ponts
sans partition
une ritournelle
Elle porte dans ses flots
l’enfant à naître
le vieil­lard en devenir
Elle cache dans ses flancs
l ‘exilé de l’aube
Dame bleue
Dame grise
elle tend ses rives
pour une éternité
à l’ hôte de passage
Mais ce soir la Seine a revê­tu des habits de gala
une péniche s’est invitée
à la recherche d’un com­pagnon de danse
la lune a allumé ses feux
le spec­ta­cle peut commencer

La bohème

La bohème n’a pas de terre
la bohème a un air
une note
une lettre

une ivresse
une étreinte

elle se chante
danse à la sur­face de la nuit
reprend souf­fle à la source du jour
A bras le corps elle dessine
ses contours
fuyantes limites
Odeurs de lointains

L’éloge des chimères

Les toits s’allument au grand soir
l’un suiv­ant l’autre
En mono­logues ou dialogues
prières ou querelles
ils enton­nent la mélodie du quotidien
l’éloge des chimères
en détail­lent le déroulé menu
sur le cadran
inflexible
Les toits dressent la table
et atten­dent l’invité
à la ride joviale
Au sous-sol
le taciturne
demeure exclus des festivités
Les toits se racon­tent leur passé
nos­tal­gies contagieuses
éphémères douleurs
En hommage

Sous la bril­lance de lune

Une pyra­mide de verre
à tra­vers la vitre
casse la nuit
Les siè­cles courent à gorge déployée
dans la cour de pierre
Les réver­bères salu­ent le promeneur
d’ailleurs
Le musée dort
L’heure est à l’écho
Aux souf­fles intermittents
Aux reflets de l’audace
Sous la bril­lance de lune

Un danc­ing s’allume

Arpenteurs
Inventeurs
ils fran­chissent les murs de leur chambre
pour touch­er aux con­fins de l’inconnu
Place de Clichy la Butte s’agenouille
et prêche
et déclame
et chante
La brasserie accueille l’errance à sa table
la nourrit
Une boule de bil­lard perd le Nord sur la rive droite
Un danc­ing s’allume dans la nuit solaire
Les coupes s’entrechoquent
au car­refour des arrondisse­ments d’une ville
aux amours croisées

 

Présentation de l’auteur

Muriel Augry

Muriel AUGRY est poète, nou­vel­liste et essay­iste française née à Paris. Elle est doc­teur ès let­tres de l’Université de Paris Sor­bonne. Elle a enseigné à l’Université de Turin et tra­vail­lé pour les ser­vices cul­turels de l’Ambassade de France en Ital­ie, au Maroc et en Roumanie comme direc­trice d’Institut français. Elle se con­sacre à l’écriture main­tenant et passe son temps entre Paris, Rome et Rabat.

Elle a obtenu le « Prix Roland de Jou­venel » de l’Académie française pour son essai Le cos­mopolitisme de Stend­hal et Mérimée (édi­tions Slatkine) et le « Prix Vénus Khoury Gha­ta de la Poésie illus­trée » pour son livre Les lignes de l’attente (édi­tions Voix d’encre) en col­lab­o­ra­tion avec le cal­ligraphe Abdal­lah Akar. Elle est l’auteure d’une cinquan­taine d’articles cri­tiques sur la lit­téra­ture européenne roman­tique, d’une série de nou­velles et de dix recueils de poésies parus en France et à l’étranger. Son dernier recueil, Memen­to a été pub­lié en col­lab­o­ra­tion avec le poète roumain Andrei Novac (aux édi­tions Tran­signum). Ses poèmes sont traduits en divers­es langues : ital­ien, roumain, espag­nol, por­tu­gais, anglais, arabe, turc, albanais et occ­i­tan. Pour ses livres de poésie, elle a tra­vail­lé en col­lab­o­ra­tion avec des artistes pein­tres à l’échelle inter­na­tionale : le pein­tre algérien Ais­sa Ikken, maro­cain Youssef Elka­h­fai, tunisien Abdal­lah Akar, ital­ien Mar­co Nereo Rotel­li, roumain Dra­gos Patrascu et les pein­tres fran­co serbes Vladimir et Slo­bo­dan Peskire­vic . Elle a par­ticipé à de nom­breux ouvrages col­lec­tifs : recueils de nou­velles, antholo­gies poétiques.

Elle a don­né des lec­tures et con­férences et par­ticipé à divers salons du livre aus­si bien en France qu’ à l’étranger. Elle a par­ticipé récem­ment au fes­ti­val «  Lit­téra­tures itinérantes »  à Tanger, « Poéti­cales »à Abid­jan, au Marché de la Poésie à Paris, au Mediter­ranean Poet­ry Fes­ti­val à Rome. Elle est Prési­dente de l’Association du Par­lement des Ecrivaines fran­coph­o­nes, admin­is­tra­trice de la Mai­son de Poésie et mem­bre de la Société des gens de Lettres.

Autres lec­tures

Muriel Augry, Ne me dérêve pas

Poésie courte, frag­ments, tou­jours accom­pa­g­nés d’images, c’est une con­stante des recueils de Muriel Augry. Celui-ci, Ne me dérêve pas, échappe d’autant moins à la règle qu’il s’agit d’une antholo­gie fran­­co-roumaine traduite par Ralu­ca Var­lan Bondor, […]

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