Vingt ans de poèmes. Un par an, pour l’an­niver­saire du 4 juin 1989, ce jour où des grévistes de la faim chi­nois, étu­di­ants ou citadins lamb­da, ont été chas­sés de la place Tian’an­men, pour­chas­sés, arrêtés, et pour cer­tains, tor­turés, tués, par les troupes de la loi mar­tiale, parce qu’ils ne voulaient que vivre comme tout être humain en a le droit : avec la lib­erté du choix.

Livre du vivre, non du deuil. Il ne s’ag­it pas de fêter l’an­niver­saire d’un décès, celui de l’e­spoir démoc­ra­tique en Chine ; mais de per­pétuer le sou­venir de ceux qui, comme l’au­teur, se sont bat­tus, paci­fique­ment, pour que l’e­spoir du rêve devi­enne l’év­i­dence d’une réalité.

Un com­bat, oui, il faut pren­dre les armes de la patience et de l’in­tel­li­gence pour s’op­pos­er à la doc­trine déshu­man­isante d’une dic­tature ; un com­bat paci­fique qui, de poème en poème, offre à voir les séquelles durables, les plaies béantes — tous les remords et regrets.

Celui qui pense se tor­ture, seul, avec une plus grande vio­lence encore que celle des tor­tion­naires, ne cher­chant qu’à com­pren­dre pourquoi il peut encore respir­er, vivre, écrire, être. Celui qui est se demande pourquoi ce peu­ple, son his­toire, sa grandeur restent ain­si dom­inés par l’aveu­gle­ment du silence forcé.

Mais il n’ex­iste pas de réponse, pas d’ex­pli­ca­tion — cela résumerait, in fine, à enter­rer la vie, en se dis­ant : c’é­tait ain­si. Quand on met un point à la fin d’une phrase, il peut devenir final.

Le poète dit non à cette fin pos­si­ble de la résis­tance ; il écrit la mort, le sang, les mères en deuil, les jeunes qui ne vieil­liront jamais, sa pro­pre jeunesse qui hurle, qui saigne, qui pleure, mais surtout qui veut, non, qui exige de vivre, pas seule­ment de sur­vivre ; le poing levé, avec de l’en­cre au bout des doigts.

 

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