UNE TRAVERSÉE DES PYRÉNÉES « MAR A MAR »
Tout le monde a tra­ver­sé les Pyrénées.
Depuis la nuit des temps, plutôt dans le sens sud/nord pour fuir, pour le traf­ic, pour la lib­erté, pour les mariages, une his­toire de con­quêtes. Celle de mes ancêtres.
Celle qui se déploie ici, faite seule et à pied cap à l’ouest comme le soleil, s’ étend sur cinq années.
Ai patiem­ment relié un bout de la chaîne à l’autre. Que reste-t-il de ces 51 étapes segmentées ?
Gravité/Gravedad, funam­bule à la fron­tière des dis­so­lu­tions, avance avec 51 courts poèmes, rasés au plus près du vécu (quoi de plus con­cret qu’une date ?), entre­coupés de
cinq trêves avec pho­togra­phies et longs poèmes com­posés sur le mod­èle du vire­lai, rimés, métrés, comme ten­ta­tive d’ accrocher et de fix­er les déplace­ments du sou­venir en
intro­duisant le chant.
Et même avec deux grandes manch­es ouvertes, toutes les Pyrénées ne ren­trent pas dans un si petit cos­tume. Qu’importe : « Chanterai por mon corage » ! 

 

*

 

16 juin 2005

Je dés­ap­prou­ve la désescalade
de la chem­inée du Canigou.
Je proteste vive­ment contre
ce chaos ver­ti­cal plus funeste
qu’ un rassem­ble­ment de sorcières.
Toute­fois, la ter­reur passée,
elle est encore bien vaste,
la per­spec­tive des monstres.

 

*

29 juil­let 2008

Le jour où l’ aube tombera
dans les qua­tre directions,
le jour où les forêts s’ engageront
sur des chemins de lave,
le jour où, assise comme les corbeaux,
je frap­perai au comp­toir du temps,
ce jour là, tu m’ aimeras.

 

*

12 août 2009

Soudain la red­di­tion m’appelle par mon nom.
Je me retourne :
rien que les yeux secs
d’une gare pâle.

 

*

 

3 sep­tem­bre 2011

Depuis le 11.02.2005,
ce jeune berg­er porte des bottes vertes,
une salopette grise, un pull de laine gris et
une par­ka verte.
Par­fois la mon­tagne s’ ouvre comme une mer
et le sauve­tage des engloutis est impossible.
Alors leurs voix
(par-dessous)
   font un bruit de bottes.

 

*

 

7 juil­let 2012

Même avec le souf­fle de la tortue,
même avec les nerfs du cheval de mine,
même avec la ruse des anciens dieux
on est ce que l’ on vise.
On n’ atteint pas l’ Atlantique.
 

image_pdfimage_print