Flamme fumée
ombre couleur
trem­blent les formes éphémères de mon cœur
le frôle­ment de la tendresse
embue mes yeux

 

 

Il ne fal­lait pas grand chose pour que s’ouvre
comme une baie le large aux mou­ve­ment marins
de mes pensées.

Le plus dur était le calme et le silence après
de longues march­es délavées.

Les linges de mai­son dans l’antre de mes yeux
pendaient au moin­dres oraisons. 

J’at­tendais le pas­sage des grues dans un ciel
de Camar­gue que jamais je n’avais respiré.

Pour­tant le bruisse­ment de l’at­tente était bien
l’aile qui pense la résis­tance et la chaleur à son toucher.

 

 

 

J’ou­vrais des golfes de ver­dures aux consonnes.
Je les voy­ais dansantes comme  flammes
au-delà des veilles de mon corps;

dans les buis­sons du rêve, dans le sommeil,
dans les champs que tou­jours je contemple
quand ils sont labourés.

La puis­sance de peu pre­nait toute mon âme
dans son geste d’eau claire.

J’aimais garder le sou­venir de gestes simples
comme don du matin
et le soir
ten­dant aux ombres qui mon­taient ce butin décanté,
je ten­tais de trac­er d’un doigt la dune de mes sables
pour ne pas m’égarer.

Par­fois le temps bri­sait le sceau de ses angles trop purs
la grâce d’un mot comme le pain trempé
me lavait de toutes mes attentes
pour enfin délier
l’im­age d’un mot gardé.

L’ef­fort à ses con­fins illu­mi­nait alors
la grise et longue traine des pass­es tra­ver­sées.

 

 

 

Je n´avais pas de corps
et je voulais aimer
Je pre­nais vent dehors
brûlant d´éternité
Je dus apprendre
trou­ver la source
Une eau coulait
chargée de ciel
et blanche comme blé
J´ouvris les yeux
de joie et la douleur
d´aimer la terre enfin
me fut donnée

 

 

 

Passé l’an­gle mort de la soif
les chemins se ten­dent pour écouter
les fougères aux courbes ancestrales
dont le galbe reprend le geste des prières
quand elles trem­blent au pas­sage des fables.

Sur les cail­loux jetés que nos souliers triturent
aux rythmes de la voix, nous allions cahotant
comme un cheval au trot
au delà de nos os;
aux riv­ières contentes
boire le ciel sen­si­ble dans les herbes aimées
au vent nous allonger.

 

Dès lors venait d’un espace sans claies
le sen­ti­ment d’aimer la terre, les nuages
couraient vers un point invis­i­ble dont je ne sais le nom
plus large que mes yeux mes yeux lais­saient le songe bleu
se déploy­er vers tous les horizons.

O comme grande la beauté de ne plus se vivre limité
emplis­sait tout le corps qui n’é­tait plus qu’un rêve
une sorte de jardin andalou
loin de l’Espagne aux sables purs
dont les fontaines franch­es ruis­sel­lent toutes nues.

 

 

Tu par­les de ce monde
avec le poids d´un feu
entre les pierres
tu es flamme lumière
tu es couleur
l´or te déchire
et la parole apaise
ton cœur et son attente

 

 

La venue sim­ple­ment des visages,
toutes les images autour de toi,
la table, la fenêtre, le papi­er, ton corps
et le som­meil de ton aimée.

Le matin qui reprend souf­fle dans tes yeux,
l’heure qui attend le bruit des portes
cet arbre puis­sant, le hêtre rouge
dans le quarti­er dont tu suivais
la lente métamorphose.

Tout cela te salue au loin dans la mémoire
se rap­proche de ton vœux le plus tenace
de trou­ver un chemin de vivre et de penser
dans les images.

Certes le temps ne comptent pas le grain
de ce rivage, c’est en dessous que les écorces
tombent, que les enfants devi­en­nent grands
et que les peurs s’effacent.

Tu dis­ais que les mots sont des vitraux
dont les flammes s’ani­ment la nuit
et tu le dis encore regar­dant le soleil
s’en aller con­sumer nos veilles endormies.

La lumière du silence monte enfin
trempe de son eau vive le mur blanc,
la page vierge de rai­son où mûrit la parole
et déjà le futur incer­tain des moissons.

 

 

                            Ce fut la nuit

dans un poème
et dans son chant
l´oiseau sur­git
comme du vent.
Par la témérité
d´une parole brève
l´image se fit plus
savante que chemin

Qu’une seule voyelle, qu’une con­sonne à peine
bal­bu­tiée ou son­nante prenne le vent de ma voix
par son revers sur la pente d’un souf­fle délié
et voilà que le lieu de mon corps s’amenuise
comme  gris et bleu de fumée.

Une flamme pro­duit l’élan de l’être sa fragilité.
L’at­ten­tion qui est peut-être le courage de penser
n’a que faire des images et ne tient à rien d’autre
qu’à l’émer­gence de la terre.

Une parole a sur­git de la roche
mais la roche savait le silence de dieu.
Sa couleur et sa dense présence, au milieu
de la lumière qui n’est pas l’om­bre de mes yeux,
a fleu­rit d’aubépine son calme
jusqu’au rouge garance des baies au jardin.

Plus courte que le jour et sim­ple que le thym
mais plus forte que le temps défait de ses saisons,
une sagesse prend son vol sans perde la raison,
sans que l’ivresse lace la tresse du passage
où le désir n’est autre que l’ar­bre de mes dons.

 

 

Enveloppe de vent
ocre d´aube et de vie
tu enfantes le jour
dans l´âme de l´ami.
Du souf­fle qui revient
sur lui-même
apprend à condenser
le silence
et la danse de nuit

La lumière de nuit dans la parole
n’a rien d’une ombre habitée de luisances
plus ou moins profondes.
Elle est un peu­ple de mémoire,
d’en­fance, de riv­ières et de temps.

La terre se sou­vient de ses ombrages,
ses arbres ont dess­inés sur l’é­corce des souches
le som­meil évi­dent des phras­es de nos bouches.

Cepen­dant la ramure des saisons que la pluie
rend plus sou­ple et plus vive frémit en regardant
l’é­coute qui dérive comme un vaste pays
sur de som­bres pensées.

Mais au dessous scin­til­lent de curieux poissons.
Ils man­gent les étoiles, se délivrent de leurs écailles
puis s’en vont. Leur absence soudain résonne comme un fil
ten­du entre mon âme et l’horizon.

C’est par là que tu viens me tiss­er les images.
C’est par l’in­fime d’un chemin que tes pas de neige pure
parvi­en­nent aux con­fins plaines de mon front.

 

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