I

Ô silence !
Les gouttes te précèdent,
tra­versent les points
de ton milleper­tu­is jaune
bal­ancé au pendule
des tiges que tu vides
à gorge pleine.
Après toi l’amande
sonne creux,
coque rapi­de à descendre
le fil de tes nervures
roulant sous deux doigts.
D’un souf­fle membraneux
les menus clappements
rassem­blés dans ta baguenaude
tapo­tent l’un après l’autre
ton sac d’air tendu.

 

 

 

II

Ô silence !
A l’ar­rière d’une averse
sans bat­te­ment au fond,
des fleurs aphones
te reti­en­nent en elles,
d’un pro­fond soupir t’écrasent.
Bé tu laiss­es passage
au cri de ta délivre,
hors de toi tu sursautes
par un déplissement.

 

 

 

III

Ô silence !
virevoltante
la feuille chute en toi,
tu tran­spires de sa lymphe
dès que la nuit t’enserre.
Elle s’imprègne des sucs
de ta bouche perdue.
Les traces que tu laisses
sur une épine ceinte
sise autour du collier,
le sacre de ta face,
dard dedans tes yeux,
diront ta force
au cœur des acacias.

 

 

 

IV

Ô silence !
les feuilles retournées
suiv­ent le relief tors
des lignes à parcourir
de ton miroir complexe.
Ta sève montante
fait sail­lir les veines
aus­sitôt que le vent,
par va-et-vient levé,
argente les tilleuls
venus sur l’autre face.

 

 

V

Ô silence!
Tu t’incises,
ajusté bord sur bord
au lobe d’une oreille
tail­lée dans la cymbale
de son pendentif.
En cet anneau
introduit
tu éventes l’air
qu’il refuse d’expirer
en légère brise.

 

 

VI

Ô silence !
Tu t’en­gen­dres des serments
de tes orbites scellées,
hors ton éclat
par elles enclos
gran­dis­sent tes soleils.
Ta bouche ferme une alcôve,
dessous sa voûte,
à l’é­cart aposté,
tu écoutes du timbre
en revers les échos
psalmod­iés dans la crypte
où leurs voix se concertent.

 

 

VII

Ô silence !
Dans le tri­an­gle de ta nuit
ne s’en­tend plus rien
que le rebond d’un disque,
point d’ap­pel de l’homme.
Passé le mur des ombres
il arpente le noir,
force le rude impact
à la croix érigée
pour te ravir en lui.
 

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