à Gun­vor Hofmo
                                                                                 voix de Norvège

                                                                                  à Per Buvik

 

                 La poésie (…) : cette parole qui
                 recueille l’infini là où n’arrivent
                 que du mor­tel et du pour rien.

                 Paul Celan 

De tes neiges intimes
Tu nous brûles à vif

 

De ton mur­mure d’infini
Ta voix cristallise
Nos ombres transitoires

Mou­ette constellée
En plein vol déchiquetée

 

Tes ailes s’éparpillent
De leurs éclats macabres
Qui s’engouffrent en ellipse
Dans notre âme sidérée

Voix d’ombre
                 Voix de neige

 

Ton mur­mure transcende
Notre cri sacrifié

De tes ombres intimes
Tu accèdes à l’éclat du deuil

 

Voix d’ombre
                 Voix de neige

Ta douleur nous foudroie
De son mur­mure d’apothéose

 

                     *

 

 

Brais­es murmurantes
Tes paroles se faufilent

 

Pour percer le silence

Com­ment l’effleurer
De notre écoute déchirée

 

Entre l’effroi de ta douleur
Et le cri de notre révolte

Com­ment l’effleurer
Ta voix de l’entre-deux

 

Assoif­fée de confins
Sous une lune qui débusque

Une à une
           tes étoiles
                       explosées

 

Brais­es murmurantes
Tes paroles défilent

Sur l’autel implacable
Du néant qui crépite

 

Pour met­tre à feu notre mémoire

Là-bas de l’autre côté
Ta voix de nuit devenue

 

                   *

 

De givre de feu
De flamme de glace

Ta voix s’engloutit
Dans les gouf­fre muets
Des con­fins cruels

 

De givre de feu
De flamme de glace

Ta voix d’outre- nuit
Qui se refuse l’oubli

 

Quand tes pas se tracent
Quand tes pas se perdent

Peu à  peu happés
Par le silence torturé 

 

De givre de feu
De flamme de glace

Ta voix d’outre- nuit
Qui se refuse le cri

 

                                                      Du cru­el oubli

         *

 

 

De soli­tude absolue
Ta poésie qui ne s’est tue

 

Pro­ces­sion de rêves brisés
L’élan s’y fait torture

Figé dans le rythme funèbre
De tes poèmes amenuisés

 

Choré­gra­phie tremblée
Autour de l’oubli redouté

Soudain l’élan t’arrache vive
Aux larmes de glace
Qui te lacèrent les lèvres

 

Danse de mots ravivés
Ton cortège intérieur
De soupirs de cris de deuil

Jusqu’à la tombe de l’amie
Au creux des nuages

 

                *

 

On peut lire dans Europe n° 983, mars 2011, p.352–354, la présen­ta­tion de Tout de la nuit est sans nom de Gun­vor Hof­mo (1921–1995) par Muriel Stuck­el, à pro­pos de la toute pre­mière pub­li­ca­tion en français de ses poèmes, traduits du norvégien par Pierre Grouix et Grete Klep­pen, aux Edi­tions Rafaël de Surtis.
Cet événe­ment édi­to­r­i­al fut à l’origine du sémi­naire organ­isé par Per Buvik, pro­fesseur à l’Université de Bergen, le 16 octo­bre 2009, au Cen­tre de coopéra­tion fran­co-norvégi­en­ne en sci­ences sociales et humaines, Mai­son des Sci­ences de l’Homme, 54 Boule­vard Ras­pail, Paris : « Gun­vor Hof­mo , une poétesse mod­erne du Nord ».

 

 

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