Ecrire sur la poésie d’un peu­ple ou d’un pays n’est pas une tâche facile. Certes, dans chaque pays, nous trou­vons un dénom­i­na­teur com­mun, épique ‚his­torique et poé­tique, que l’on appelle “la cul­ture nationale”,mais force est à con­stater que tous les peu­ples, même ceux qui habitent l’île la plus petite du monde présen­tent une dif­férence entre expres­sions lin­guis­tiques, lit­téraires et poé­tiques, et même de ceux qui vivent dans le pays le plus petit du monde, il est pos­si­ble de trou­ver deux poètes entière­ment dif­férents avec des univers com­plète­ment opposés. Les divers­es expres­sions poé­tiques se trou­vent dans l’Europe Cen­trale ou l’Europe de l’Est et depuis le Moyen Age, leur force et diver­sité ont tou­jours été si grandes que per­son­ne n’a jamais pu con­fon­dre le par­cours poé­tique du peu­ple polon­ais avec la poésie Tchèque, le sen­ti­ment lit­téraire Russe avec les démarch­es poé­tiques Roumaines ou bul­gares. Et si jamais les pays européens de l’Ouest ont maintes fois con­fon­du les tra­di­tions lit­téraires de leur pays voisins de l’Est, ces erreurs-là ont été cor­rigées lorsque les dif­férences ontiques ont été établies vers la moitie du XXème siè­cle. Alors, com­ment oserais-je présen­ter l’œuvre poé­tique d’un poète par­ti­c­uli­er et serbe, au nom de l’entière pro­duc­tion poé­tique, his­torique qui appar­tient à la voix d’un peuple ?

En choi­sis­sant le tra­vail éclec­tique de Milan Orlic, mon con­tem­po­rain serbe, comme le représen­tant et représen­tatif d’une tra­di­tion poé­tique assez anci­enne et par­ti­c­ulière chez les Slaves du Sud dont les serbes font par­tie, je fais la ten­ta­tive de chercher les descen­dants d’une voix à la fois his­torique et spé­ci­fique dans son authen­tic­ité, ou plutôt la voix qui est unique mais qui pour autant  présente la plu­ral­ité de voix divers­es, une force sig­nifi­ante et sig­ni­fica­tive qui toute seule peut nous don­ner un avant-goût d’une sélec­tion plus large.  La tâche à la fois  théorique et cri­tique se mul­ti­plie dans le cas de con­tem­po­rains car l’histoire de la lit­téra­ture prend con­science de la présence d’un poète-phare  sou­vent beau­coup trop tard, après sa mort, car l’œuvre de tout écrivain ou artiste peut subir la val­ori­sa­tion juste et pro­fonde seule­ment après cer­tain pas­sage. Les prix lit­téraires sont sou­vent les attrib­uts de la mode ou de la poli­tique con­tem­po­raine, inter­na­tionale, et ne sont pas utiles pour com­pren­dre et val­oris­er un poète, et le posi­tion­nement de son œuvre en général.

Mais, comme j’ai déjà été sur les traces d’œuvres d’un très grand poète mod­erniste serbe, Milosh Crn­jan­s­ki, j’ai suivi d’une dis­tance saine et mod­érée la pro­duc­tion poé­tique con­tem­po­raine de mon pays natal. J’ai observé beau­coup d’avatars, poètes décents et instru­its, à la fois tal­entueux et intéres­sants mais… beau­coup trop ressem­blent aux copies con­formes de grands maitres de la poésie française, alle­mande, tchèque, polon­aise, por­tu­gaise. Ma pro­pre voix m’a sem­blé un peu trop améri­caine, à l’heure de mon exil sco­laire dans les Etats-Unis des années 1980. Milan Orlic est ren­tré sur la scène lit­téraire serbe par la porte grande ouverte en 1987 avec son livre « De Sur/Reel », qui est à la fois une médi­ta­tion philosophique, poé­tique et prosaïque dont la forme hybride et mixte rap­pelle  un roman du poète, et flirte avec l’essai philosophique. La dis­tance entre son éru­di­tion et le sen­ti­ment dans son œuvre est depuis son début très équili­bré ain­si que la rela­tion entre le rêve et le réel dans son con­tenu. D’une approche élé­gante et très esthétisée à l’envers de cette forme il conçoit le genre même comme un ter­rain expéri­men­tal ou il promène sa forme d’expression d’une façon libre, dis­jonc­tée et déstruc­turée. Son approche frag­men­taire de la « prose » et la prob­lé­ma­ti­sa­tion extrême de la per­son­ne qui par­le dans son écri­t­ure nous rap­pel­lent de grands précé­dents lit­téraires, les auteurs comme Borges ou Calvi­no, mais aus­si ses con­tem­po­rains, écrivains serbes Neman­ja Mitro­vic et Vladimir Pistalo.

Mais dans son œuvre « Batarde », Orlic avait tou­jours rel­a­tivisé le genre plus que les autres, à tel point que son pre­mier  recueil de poésie titré « De la Nuit Polaire » (1995) n’est pas apparu comme un “trans­fert” à un autre genre. On l’a plutôt vu comme un développe­ment naturel de ses pra­tiques lit­téraires, une con­tin­u­a­tion de la tra­di­tion d’écri­t­ure etablie par son grand maitre mod­erniste Milosh Crn­jan­s­ki dont Orlic emprunte la lib­erté d’expression et non le style formel. Pour­tant son édi­teur, pre­mier lecteur dudit recueil, Cedomir Mirkovic, fait une com­para­i­son inter­es­sante avec le grande poète serbe, Crn­jan­s­ki « Si Crn­jan­s­ki vivait dans cette époque, lui, avec son énergie vitale, sa vision du monde et son sen­ti­ment poé­tique qui datent depuis la créa­tion de son poème « Suma­tra »- il écrirait comme Milan Orlic ! » Un vrai grand com­pli­ment, car le poème « Suma­tra » , à sa paru­tion, devint très vite un pro­gramme poé­tique, un mou­ve­ment, qui devint un pil­li­er du mod­ernisme serbe. Créée après la  1ere guerre mon­di­ale, « Suma­tra » est une rêver­ie du jeune Crn­jan­s­ki qui, dégouté par la tuerie, explore la géo­gra­phie d’esprit et des cor­re­spon­dances bergsoni­ennes. Orlic, philosophe bergsonien lui aus­si. par­le de temps durs, les années 1990 en Ser­bie, la pré­pa­ra­tion de la guerre civile, ou la pau­vreté économique et celle de l’esprit, pous­sant le poète dans une nuit de glace et de froideur éter­nelle, qu’il titre « La nuit polaire ». Sur les traces de Crn­jan­s­ki, Orlic applique sa méth­ode d’écriture et trans­forme ses images poé­tiques qu’il avait déjà établies dans son roman « Momo dans la nuit polaire » et écrit dans son poème :

 

Sous les pâtes de rennes/ ça craque :
Comme sur la neige, la neige blanche
De pétales. De fleur aman­dine : sur la chaude
Croupe, elle est mouil­lée, transpirée.
Les grelots, ils son­nent. Pierrot
D’un vis­age triste, est assis
Dans la luge. Il souf­fle dans le petit miroir. 

 

Qui est le poète, l’être humain en Ser­bie, dans l’ère du tyran ? Il craque, certes, sous la neige de la dic­tature et de la tor­ture général­isées, d’expression mélan­col­ique, il est aus­si un chaman qui regarde son pro­pre des­tin, et le des­tin de son peu­ple dans le miroir. Mais ce miroir est sale, pour  élargir la métaphore- et il faut souf­fler beau­coup et longtemps pour que la vraie image du peu­ple et de la vie qua­si-nor­male appa­rais­sent sur le miroir. Le dés­espoir du poète est d’une froideur mélan­col­ique qui évoque la poésie expres­sion­niste d’un Heim ou d’un Trakl, où la couleur a tou­jours cer­taine valeur, plus que sym­bol­ique. Il entre­tient une rela­tion ambiguë avec la notion du temps- comme Berg­son, il ne le méprise pas, mais trans­forme la notion du temps réel quand celui-ci réclame le passé qui habite dans le présent et qui est, selon lui, envahi par l’avenir (dans son entre­tien avec jele­na Nikolic, Poli­ti­ka) Ici, dans le même texte il évoque le poète mod­erne Milan Rakic, qui a été le pre­mier poète serbe à  rel­a­tivis­er la notion du temps dans la poésie. En 1903, Rakic intro­duit notam­ment la notion de « surtemps » qui n’est ni le temps philosophique, ni le temps religieux, ni le temps math­é­ma­tique, ni le cos­mique, ni le temps méthodologique mais plutôt une cer­taine con­science du temps , une syn­thèse méta-tem­po­rale de tous les savoirs et de toutes les con­nais­sances humaines evo­qués par la com­préhen­sion du « Zeit­gheist ». Orlic, en tant que poète, partage lui aus­si cette notion. Dans sa poésie il favorise tou­jours des vers qui ressem­blent aux phras­es romanesques, une pra­tique qui n’est, selon Joan Flo­ra,  poète con­tem­po­rain rien d’autre que « la chemise qui cou­vre toutes choses ». Il voit ses poèmes comme de petites minia­tures lyriques qui peu­vent être lues comme « des nou­velles cour­tes d’une minute » et qui nous rap­pel­lent Erke­ny ou Daniel Harms. Il les voit comme les « petits con­ti­nents que nous pou­vons met­tre sur la paume », mais  leur niveau ryth­mique ou leur couche séman­tique nous rap­pel­lent claire­ment le fait que leur procédé a été poétique

 

Le Poème comme la recherche éter­nelle de la Beauté, la Ver­ité et le Sens

Orlic mène un dia­logue avec pas mal de poètes et d’écrivains qui appar­ti­en­nent à la bib­lio­thèque mon­di­ale. Le fait qu’il n’écrit pas de vers tra­di­tion­nels, ne l’empêche pas d’apprécier un choix poé­tique qui appar­tient à l’histoire de la poésie, au con­traire ! Il dit que les poètes d’aujourd’hui expri­ment sou­vent une atti­tude non tra­di­tion­nelle à l’envers de la poésie, mais à son avis, une telle atti­tude est inutile et néfaste pour l’écriture. Il souligne le fait que le dia­logue avec le passé ne suf­fit pas dans l’écriture, et que le désir seul d’être con­tem­po­rain et « à la mode » ne garan­tit pas un avance­ment qual­i­tatif dans la com­po­si­tion de vers. Les bons, grands poètes par­mi les siè­cles ont tou­jours essayé de con­stru­ire un monde authen­tique, leur monde à part qui les dis­tingue de la tra­di­tion à laque­lle ils appar­ti­en­nent, la tra­di­tion avec laque­lle ils dia­loguent de nou­veau chaque fois qu’ ils doivent écrire, mais, ceci-dit, il s’avère très cri­tique vis-à-vis de ses col­lègues con­tem­po­rains, sou­vent les auto­di­dactes qui entrent dans l’arène lit­téraire avec un appétit de glad­i­a­teurs et de politi­ciens qui, sou­vent motivés par des pas­sions de bas niveau, voir par le désir au pou­voir, abi­ment la lit­téra­ture serbe. Il se sou­vient d’Ho­racius Flac qui dis­ait que « la médi­ocrité est inter­dite aux poètes » car la poésie est la plus belle fleur de la spir­i­tu­al­ité d’un peu­ple. Et que les poètes qui nég­li­gent cette pen­sée, finis­sent oblig­a­toire­ment dans « le musée de l’ennui » d’un Her­bert. Par con­tre, il voit Milosh Crn­jan­s­ki comme son vrai maître spir­ituel et son père intel­lectuel car il « pos­sé­dait un génie qui, d’une façon décrite par Niet­zsche, nous appelle de loin par­mi de siè­cles. » Orlic a con­sacré beau­coup de ses textes cri­tiques et théoriques au phénomène Crn­jan­s­ki en soulig­nant le fait que la poésie est écrite et lue par une poignées d’âmes, celles qui com­prend la sub­til­ité de prémiss­es poé­tiques, la com­plex­ité de ses thèmes et la sin­gu­lar­ité de ses procédés, autrement dit- toutes ses qual­ités qui sont rien qu’un défi d’esprit  jeté aux lecteurs enrichis d’une sen­si­bil­ité haute­ment élevée.

 

Caloca­ga­tia

En effet, Milan Orlic est un poète serbe nova­teur, mais cousu « à l’ancienne », auquel le cri­tique Drasko Red­jep trou­ve une place unique et excep­tion­nelle, un pupitre pour un bijou rare dans la pro­duc­tion lit­téraire qui en Ser­bie et ailleurs est dev­enue, une foire com­mer­ciale où l’on ne trou­ve sou­vent que de fauss­es per­les. Dans son œuvre lit­téraire, Orlic, main­tient le car­ac­tère et ain­si le sujet lit­téraire qui se présente sous l’auspice d’un « Pseu­do ». Le poète conçoit le rôle arti­fi­ciel du Pseu­do comme celui d’un  bâtis­seur qui  con­stru­it sa pro­pre réal­ité et son pro­pre palais d’imagination- le rôle qui n’est pas trop loin de l’anonyme/génie éter­nel tel que Homer ou Jorge Luis Borges le vivaient. Orlic, le philosophe conçoit ce rôle dans le cadre d’un exploit fixé par Lacan ou Lev­inas pour qui le Pseu­do n’est rien d’autre que le grand Autre. Ain­si l’auteur nous rap­pelle que nous trou­vons ce rôle dans toutes les épo­ques (pseu­do-Erchard, les poètes de Moyen-Age etc) En fait, cette notion de Pseu­do ne se retrou­ve pas seule­ment dans le haut Mod­ernisme ou l’avant-garde lit­téraire mais ils vont se l’approprier (Crn­jan­s­ki, Fer­nan­do Pesoa, etc). En effet, dans la dernière phase de son tra­vail, le poète s’éloigne de ces exploits qu’il ado­rait, de la lit­téra­ture post­mod­erne, et qu’il cri­tique avec per­ti­nence. Le post­mod­ernisme avait ten­dance à oubli­er la quête prin­ci­pale de l’œuvre de l’art, vers la Beauté et le Sens de ladite œuvre que la plu­part des cri­tiques et his­to­riens lit­téraires- tel John Barth- avaient défi­nis comme  « obsolètes » et inutiles au milieu du XXème siè­cle. Orlic trou­ve que les auteurs soit-dis­ant post­mod­ernes  oublient l’Esthétique et la tâche prin­ci­pale de toute lit­téra­ture qui est la quête vers la Beauté et le Sens dans l’œuvre de l’art, pour l’amour de nou­velles valeurs post­mod­ernes qui sont l’intertextualité, la frag­men­ta­tion, l’introduction de  nou­veaux types d’auteurs ou la batardi­s­a­tion du genre. Il souligne que la notion de « Caloca­ga­tia » ou la quête vers la fusion de valeurs éthiques et esthé­tiques est un principe très impor­tant pour toute œuvre d’art depuis l’époque grecque clas­sique ; cette ten­dance méta­physique est dev­enue rare car elle promeut la spir­i­tu­al­ité, l’innocence, voir les qual­ités hau­taines et sub­limes dans l’œuvre artis­tique- sans que la géo­gra­phie “de la nuit Polaire artis­tique” com­mence  à domin­er. Sans la quête esthé­tique, l’art court le dan­ger de devenir art d’agitprop ou l’utile stal­in­ien qui sert un but poli­tique quel­conque, et en effet, il doit demeur­er libre. Le livre de Orlic « De la Nuit Polaire » suit son pro­gramme suma­traïque, com­mencé en par­tie par Milosh Crn­jan­s­ki dont la quête pour « une étoile cer­clée d’un bleu infi­ni», la quête qui exam­ine les ques­tions auto-poé­tiques sur l’art et son rôle en général. Dans la nuit polaire, le poète de non-sens cherche les oasis du Sens et la Beauté méta­physiques qui sont les inter-espaces de la vraie exis­tence humaine, qui exis­tent comme les inter­mundia epi­cureens et qui amè­nent le change­ment ontologique par cer­tain para­doxe de leur exis­tence. Ce change­ment  de saisons qu’as­surent les oasis du Sens et de la beauté détourne et mar­gin­alise les formes de non-sens de notre exis­tence, soit éthiques soit esthé­tiques. Para­doxale­ment ces points d’espace, même minus­cules s’élargissent et pren­nent de l’ampleur à l’endroit ou ils doivent dis­paraître car ils ne pos­sè­dent apparem­ment ni les con­di­tions pour s’épanouir, ni la bonne rai­son d’exister. Leur rai­son d’être est pure­ment méta­physique, et la métaphore de la nuit polaire et de leur exis­tence appar­tient aus­si bien à Crn­jan­s­ki qu’à Milan Orlic

Les nou­veaux livres d’Or­lic présen­tent d’abord son désir de couper les liens avec les nou­velles tra­di­tions soit dis­ant post­mod­ernes car, comme il le souligne ailleurs « il ne voudrait pas être pris en otage d’un mou­ve­ment artis­tique qu’il avait en par­tie lancé et crée”. Il souligne plusieurs fois dans son œuvre cri­tique qu’il croit au trans­mod­ernisme qui englobe, en tant que mou­ve­ment, l’époque post­mod­erne, la sin­gu­lar­ité, les tra­di­tions poé­tiques par­ti­c­ulières, les théories qui appar­ti­en­nent aux poètes à  « petite » cul­ture, mais qui exclut leur logo­cen­trisme ou leur dom­i­na­tion externes. L’idée  quin­tes­sen­tielle de ce mou­ve­ment est la lib­erté de créa­tion qui est uni­verselle. Cette idée ne se soumet pas à une idée poé­tique tra­di­tion­nelle ou éclec­tique mais elle englobe plusieurs notions de prax­is dans la poésie.

Dans sa poésie et égale­ment dans son tra­vail théorique, notam­ment avec ses livres d’essai sur la nou­velle poésie serbe “post­mod­erne”, Orlic s’est tou­jours bat­tu pour “le mot vrai et juste”. Il a attaqué, d’une façon à la fois per­ti­nente et farouche toutes les nou­velles ten­dances mondaines et pathé­tiques de la lit­téra­ture récente et nationale. Il a attaqué un phénomène soci­ologique qui au nom de la lib­erté artis­tique, “retrou­vé” après l’époque post stal­in­i­enne Tito avait per­mis la pro­liféra­tion d’une lit­téra­ture à l’e­sprit minable et médi­a­tique, mais qui se croit libre et démoc­ra­tique. Dans une société qui est à la recherche d’une nou­velle iden­tité, où toutes les démarch­es extralit­téraires obsè­dent la majorité des par­tic­i­pants du marché édi­to­r­i­al ain­si que les médias, où la plu­part des écrivains se sen­tent con­cernés par la poli­tique avant la lité­tra­ture, la voix sin­gulière du poète en quête de la Vérité et de l’intégrité de l’expression se trou­ve sou­vent aba­sour­die par le bruit médi­a­tique et com­mer­cial. Orlic est un com­bat­tant puis­sant con­tre ces ten­dances som­bres qui nient l’idée du développe­ment artis­tique et lit­téraire dans sa société qui est en train de se remet­tre au niveau digne et civil­isé. Il voit toutes ces ten­dances comme la néga­tion de l’opinion publique de la base, comme il se sent témoin d’une vio­lence mal­menée, la vio­lence qu’il a subie de la part d’un abso­lutisme igno­rant et aveu­gle ou l’esprit provin­cial et “petit-bour­geois” règne « sans lim­ite et sans aucun con­trôle ». Afin d’améliorer l’état de la cul­ture lit­téraire, même générale dans son pays natal, il dirige une revue avant-garde « Sveske » (Cahiers) et une petite mai­son d’édition qui se spé­cialise pour la lit­téra­ture, soci­ologique, philosophique et pour l’anthropologie sociale. Orlic  essaie tant bien que mal de ne pas abaiss­er ses stan­dards mul­ti­cul­turels et éthiques dans une sit­u­a­tion soci­ologique­ment, économique­ment et poli­tique­ment dif­fi­cile en Ser­bie en ce début de XXIème siè­cle, cette sit­u­a­tion qui sou­vent dépasse la foi d’un Gior­dano Bruno ou les astuces quo­ti­di­ennes d’un Brod­sky ou d’un Cheslav Milosh.

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