TEMPÊTE

 

Com­ment pou­vions-nous voir
dans le chant de l’alouette

Dans le ver­sant des tilleuls
dans l’invitation des plaines

Dans le pacte secret des abeilles
com­ment pou­vions-nous croire

Que se chargeaient au loin
les crues sauvages du lierre

———————–

Ses filles impatientes
encer­claient la vallée

Le ciel dispersait
les pluies noires du sursis

Nous l’aperçûmes enfin
dans la réflex­ion de l’alliage

Elle lançait depuis l’aube
des sil­lons affamés de désert

———————

Elle était masque 
elle était pesanteur

Elle était arche
sous le sable des terres

Elle était colline
dans le cri des loups

Elle était tempête
elle dan­sait sa violence

———————-

Assoif­fée de matière
déchirée de nuages

Accu­sant l’horizon
de l’avoir soudain fait chair

Elle enseignait aux êtres
la dis­si­dence du vide

———————-

Nous avons lais­sé aux courants
nos charges de lumière

Tour­nant en grappes déliées
dans le cad­ran des roches

Nous invo­quions l’aigle
aux ser­res fer­mées du jour

———————-

La tem­pête au dehors
empor­tait nos alliées

Prostrées sous une vire amie
à l’ombre des disparues

Nous atten­dions le silence

———————

La route était lourde
jonchée d’arbres couchés

Morts et avec eux
nos sœurs

Comme une soie
brumeuse

De tristesse

 

°°°

 

DÉSERT


À leurs visages
à leurs voix révoquées

À leurs mains vides
à leurs corps évadés

Qu’opposer
que répon­dre qu’élever

Sinon l’étoile
acharnée de la marche

———————–

Nous n’avons pas vu
sous la men­ace des saules

Dans le repli des fougères
ni même aux jonctions

Des ter­res ocres et brunes
qu’au pre­mier olivier

Qu’à la pre­mière dune
nous nous enfon­cions dans le désert

———————–

D’autres sont parties
vingt peut-être trente

Elles ont lais­sé vides
leurs foulards leurs tentes

Leurs habits nus
alignés sous l’auvent

Nous ne les avons pas suivies
nous ne les avons pas cherchées

Le mou­ve­ment des sables
recou­vrait leur trace

———————–

Com­bi­en étions-nous
soli­tudes brûlées

Pein­tures sèches
racines orpail­lées de soif

Éten­dues dans l’ombre
des cartes oubliées

Nous l’appelions
nous l’appelions encore

———————-

La main chaude
de l’absence

M’appela au rebord
des plaintes des falaises

J’ai jeté au vent
les car­nets de la marche

Sans la nommer

——————–

On l’ouvrait pour sentir
le bruit de la nuit

On lui volait
son silence

Elle le reprit
et finit d’exister

———————-

Tout ce temps passé
à ne regarder que l’aube

Temps d’érosions sourdes
et de colères entredites

Orages adossés à nos
arbres éven­trés de prières

Nous nous retrouverons
au banc des insoumises

Dans le refrain des mers
à l’avenir du monde

image_pdfimage_print