Sobre, élé­gante, la revue Voix d’encre est égale­ment une mai­son d’édition. La revue paraît deux fois l’an, au print­emps et à l’automne.

Sobre, élé­gante, la revue Voix d’encre est égale­ment une mai­son d’édition. La revue paraît deux fois l’an, au print­emps et à l’automne. Ce numéro 65 est donc un numéro d’automne. Il s’ouvre sur un hom­mage de Hervé Plan­quois à Jan­dek, un musi­cien améri­cain de l’extrême à pro­pos duquel Hervé Plan­quois n’hésite pas à par­ler de « psy­chédélisme cis­ter­cien ». Douze poèmes, comme douze « adress­es », si « l’esprit du chant » est bien de « révéler/ depuis un fond inconnu/ les racines de notre con­di­tion. » Mais s’agit-il seule­ment de la musique de Jandek ?

Béa­trice Lib­ert, elle, dans son ensem­ble « TRANSPARENCE et autres poèmes », cherche peut-être à attein­dre la sim­plic­ité « du lilas ce poème qui se débat/Contre lui-même et con­tre toi »… Le poème fait « Volte-face », il n’est que « le vide pré­caire d’une forme poétique ».

(…) tes pensées
Vont sans guidon ni boussole
Elles n’obéissent à personne
Ni à quoi que ce soit
Pas même à toi

Voix d’encre numéro 65, Août 2021, 64 pages, 12 €.

Paul Rod­die pro­pose trois ensem­bles : « IODISATION », « Suite hié­male » et « Apho­rismes ». Les deux pre­miers évo­quent des forces naturelles plus puis­santes que celui qui les côtoie, l’océan et l’hiver. « (…) Comme la nature est dis­con­tin­ue : au moment même où je m’allonge sur mon lit d’édredon, à deux pas d’ici, dehors, dans la nuit infréquentable, l’étang con­tin­ue de gel­er (…) » Le dernier, quant à lui, présente des maximes, des para­dox­es, ou des ques­tions, séparées par des astérisques. « C’est dans le flou artis­tique que les con­tours du poète se précisent. »

Gio­van­ni Angeli­ni, quant à lui, présente quelques extraits d’un recueil à paraître, Ce qui nous manque, et il les a inti­t­ulés COUPER DU BOIS. Lais­sons à sa poésie toute sa sen­su­al­ité énigmatique :

Comme les forestiers
le cer­cle de cette clairière
augmente-les
par soustraction
           tes mots
ain­si tu ne les auras
pas volés. 

Mohammed El Amraoui a lui-même traduit de l’arabe un ensem­ble de poèmes qu’il a appelé LE VENT REND LES CHOSES PLUS CLAIRES. Il y par­le, non sans ten­dresse ni humour, de ces absents qui le hantent, son père et sa grand-mère, morts, mais dont les paroles lui revi­en­nent sur Satan, la mort, l’ange Azraël, le vent …

Et j’affirme alors
que le vent a au moins
l’avantage de ren­dre les choses
plus claires 

Camille Loivi­er, avec (IL FAUT CONTINUER DE CREUSER SOUS LES MOTS) pro­pose cette médi­ta­tion para­doxale sur « les mots absents » : « on est comme dans le noir avec eux/Quelque chose est là ». « il exis­terait d’autres langues »… Recherche d’un mot sin­guli­er « ‑un mot ajusté à ce que l’on éprou­ve– » « jusqu’à tomber/sur une langue qui ne voudrait rien dire » et « tomber dans l’oubli » avec elle ?… Beau ver­tige hési­tant aux limites.

Jean-Michel Bollinger, lui, pro­pose des « extraits » : PÉNOMBRES LAMPES ET LUMIÈRES, où se lisent l’absence, « Le jeu de l’enfant est plus sérieux/que la plus sévère cor­rec­tion » et surtout la nescience féconde du poète :

Il grif­fonne trois mots
et songe
qu’il ne sait pas encore
C’est peut-être ce désordre
le tra­vail du poète.

Pour finir, Hen­ri Per­ri­er Gustin avec LE GRILLON PÈLERIN nous fait voy­ager au Japon, sous la pluie, l’eau se trou­vant partout. On y décou­vre des tem­ples, des auberges :

Ces bâti­ments tou­jours renouvelés
mur­murent l’âme d’un pays 

Et un regard étrange, étranger, se pose sur ces paysages, ces bâtiss­es, cet espace et ce temps qui sont ceux du voyage.

Les acryliques de Mau­rice Jayet, tout en nuances de gris, dia­loguent avec l’énigme des poèmes en pro­posant des univers où peu­vent, ou non, se recon­naître des formes.

L’ensemble du numéro 65 de VOIX D’ENCRE est donc une suite de voy­ages dans des imag­i­naires très dif­férents les uns des autres … Très évo­ca­teurs, en tout cas, que d’autres mon­des sont possibles.

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Alain Nouvel

1998, pre­mier recueil de poèmes : Trois noms her­maph­ro­dites, puis deux nou­velles : Octave Lamiel, dépuceleur suivi de Edouard et Alfred au val de l’eau. En 1999, suiv­ent His­toires d’ISLES, Con­tre-Voix, Mots ani­més recueil d’aphorismes, et, en 2000, Maux ani­maux, recueil de six nou­velles, aux édi­tions « L’Instant per­pétuel ». En 2001, pub­li­ca­tion aux édi­tions « La Chimère » créées pour l’occasion de D’Etrangère, puis Dames des trois douleurs en 2004, Vari­a­tions sur une femme don­née, et reprise en 2005, Con­tre-voies en 2008 et Nou­velles d’Eurasie en 2009. En 2014, il com­pose avec sa com­pagne des chan­sons qu’ils inter­prè­tent tous deux. Maud Leroy des « Édi­tions des Lisières », pub­lie Au nom du Nord, du Sud, de l’Est et de l’Ouest, un recueil de sept nou­velles sur les Baron­nies provençales où il vit désor­mais. Une suite à ces sept nou­velles voit ensuite le jour avec pour titre Anton. Sur les bor­ds de l’Empire du milieu (texte sur la Chine où A. Nou­v­el a vécu qua­tre ans, de 1981 à 1985, longtemps resté inédit mais dont cer­tains extraits étaient parus dans la revue « Corps écrit », numéro 25, de mars 1988 : Vues de Chine), paraît pour la fête du Print­emps 2021. Les deux ouvrages aux édi­tions « La Chimère ». Il col­la­bore régulière­ment, désor­mais, à la revue « Recours au poème ». En 2020, les édi­tions « La Cen­tau­rée » à Rennes, ont pub­lié un pre­mier recueil : Pas de rampe à la nuit ? suivi, en 2021 de Comme un chant d’oubliée.