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Revue Sarrazine, n°18

Revue Sarrazine, n°18, Suis-moi, 2018, dir. Paul de Brancion

 

Décrire le sentiment et un parcours de lecture d’une revue assez volumineuse comme c’est le cas ici, revient à penser en quoi les textes de chacun forment une sorte d’étoile, une étoile au rayonnement multiple. Et cela avec une certaine grâce, car les poèmes, les images, les entretiens dont fait état la publication, se côtoient sur un ton, une tonalité. La revue fait artistement le trait d’union entre le lecteur et l’écrivain, ainsi que les écrivains et les poètes entre eux. Tous ces textes s’arc-boutent conceptuellement, et cela jusqu’à dessiner le portrait de l’équipe éditoriale, voire de Paul de Brancion, tant le ton est uni et harmonieux. 

Revue Sarrazine, n°18, Suis-moi, 2018, dir. Paul de Brancion

Et même si deux massifs textuels se détachent et se distinguent, c’est-à-dire les 28 images accompagnées de courts poèmes de Philippe Guesdon, et les 30 pages de l’entretien de Souytin Naud qui relatent les années d’enfer du Cambodge de Pol Pot où la jeune femme a vécu enfant, ces deux pôles ne dépareillent pas. Il faut simplement accepter de suivre la ramification étoilée qui va de la peinture de la Renaissance à une des tragédies historiques de la fin du XXème siècle, en passant par la poésie toute contemporaine qui est accueillie ici. 

Du reste, si l’on suit le mouvement de ce périodique chronologiquement, si je puis dire, comme je l’ai fait, on perçoit bien comment les poèmes notamment jouent ensemble sur l’aspect graphique, utilisant les blancs, les enjambements, les coupures, les syncopes, méthode approfondie par plusieurs des poètes de la revue. 

Le propre de la revue, si je peux relater mon expérience personnelle de revuiste, c’est de faire cohabiter de l’hétérogénéité. Et avec Sarrazine, les lieux – Belgique, Italie, Cambodge, Canada Innue, etc. - les locuteurs – de plusieurs générations, pratiquant parfois plusieurs arts - les mises en scène de textes ne dénaturent pas le chemin que font les voix multiples de cette sorte de réseau ; d’ailleurs, l’ouvrage ferme presque sur un texte très intéressant à propos de Borges et de son labyrinthe de labyrinthe qu’est pour lui une bibliothèque, ramifiée par des secteurs, eux-mêmes fracturés, étoilés pas des livres. Merci à Paul de Brancion de m’avoir fait connaître sa revue, et sa quête intérieure, mouvement immobile de ces divers voyages littéraires.