Bonnes feuilles offertes par Al Manar

Par | 30 septembre 2014|Catégories : Chroniques|

Jacques Viallebesset, Sous l’étoile de Giono
(extraits)

 

 

Avec toi

Je suis avec toi âme sincère et cœur pur
Egaré dans le dédale de ta forêt obscure
Cher­chant en aveu­gle la clair­ière de l’être
Je suis le com­pagnon qui a tra­vail­lé comme toi
A qui tu peux dire tes espoirs et désirs secrets
Je t’apporte les forêts les mers les montagnes
Je suis avec toi quelles que soient tes erreurs
Dans tes yeux sont gravés tes rêves ta nostalgie
Toute l’innocence per­due depuis l’enfance
Cette absence de pureté que tu ne vois plus
C’est ain­si que la mort arrive avant l’heure
Je suis ton com­pagnon en per­pétuelle révolte
Et si la société a tué en toi cette faculté
Je te dis que les prés fleuris t’appartiennent
Je suis avec toi partout où tu es esseulé
Je t’attends aux estu­aires de ta résignation
Tu imag­ines les routes du vent les joies du monde
Au nom de l’espoir je t’offre amour et amitié
Pour soumet­tre ton désir au rythme du cosmos
Je suis avec le berg­er qui t’attend près de ta source .

 

 

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Pour saluer Giono (7)

 

S’il devait venir ce serait une nuit extraordinaire
Les touffes d’étoiles bril­laient avec des racines d’or
Quand il me mon­tra du doigt la con­stel­la­tion d’Orion
Je recon­nus le pro­fesseur d’espérance que j’attendais

La jeunesse c’est la pas­sion de l’inutile nous dit-il
Et il ense­mença de per­venche les champs et les cœurs 
Si nous savions vivre con­scients nous ne seri­ons malades
De ce trop de sang amer au lieu du sang de miel doux

Il rame­na un cerf qui courait libre par­mi nous
Et des bich­es aux cils pleu­rant de manque d’amour
Dans la ten­dresse des herbes et l’humus des forêts
Parce qu’il voulait que la joie demeure pour tous

Il fit sour­dre aux corps des tam­bours de danse
Comme la cadence forte  du sang dans les artères
Et l’on sen­tit la joie aus­si inépuis­able que l’air
Réveil­lant en nous le trop grand appétit de vivre 

Une bergère seule savait sans vrai­ment savoir
Elle por­tait en elle la joie des gestes naturels
Ne par­lait pas la langue menteuse des hommes
Mais en ini­tiée celle des agneaux et des oiseaux

Cha­cun ne peut attein­dre que la joie qu’il comprend
Les pas­sions humaines ont encore les batailles au cœur
Et la vio­lence tou­jours engen­dre la mort et le malheur
Il faudrait pour­tant  que la joie fût  tran­quille et paisible

Alors lucide­ment dés­espéré il avança dans l’orage
La foudre lui plan­ta un arbre d’or dans les épaules
Et il écla­ta dans la nuit comme une étoile perdue
Je l’attendrais pour revivre espérant son retour.
 

 

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Dans la marge (7)

 

J’aurais voulu être celui-là qui vient
Por­teur d’une joie d’être à partager
Avec tous les humains qui saignent
De leurs rêves lourds d’espoirs blessés
Je porte en moi les sucs de la terre
La danse de flamme du sang au cœur
Ma poitrine se gon­fle du vent des astres
J’halète de la sève de tout ce qui vibre
Frémit pal­pite et vit au rythme des saisons

Je voudrais être celui-là qui vient
Un arc-en-ciel doux dans les tempêtes
Un mag­ma de joie monte de mon ventre
Je t’ai retrou­vée et te tresse dans mes bras
Tes yeux font chanter toutes les sources
La joie est là bruis­sant dans ton feuillage
Bour­geon ten­dre gorgé de résine vivante
Tu es en moi comme le noy­au dans son fruit
Ma joie ne demeur­era  que si elle est tienne. 

 

 

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« Bonnes feuilles » offertes par Al Manar

Par | 23 juin 2014|Catégories : Blog|

Qua­trième de couverture :

 

A l’étale ne cesse de dire son amour pour « elle ». Par vagues, avec ampleur, selon les mod­u­la­tions d’une fugue, « elle » se déploie en sa venue, ses appari­tions, ses paysages. Méta­mor­phose de la féminité en ses pos­si­bles, « elle » n’est pas seule­ment « elle », mais, en son intime et secrète présence, un champ de blé, un refrain, la ten­dresse de la lumière à son aurore, la ren­con­tre, en son invraisem­blable justesse, d’une voix, d’un ciel, d’un signe. 

Porté par l’espace de ses silences, la pro­fondeur de son mou­ve­ment, lame de fond entrainant tou­jours au-delà, le poème laisse se déploy­er les richess­es du monde, en leur mys­tère, tou­jours plus sai­sis­sant. A l’étale, en ce sens, est comme par­cou­ru par une intrigue, nous ten­ant en haleine, au rythme de l’émerveillement. 

Ain­si, le poème se donne à lire comme un roman, un voy­age, une expéri­ence, immense et sere­ine, mar­iée à la vie, à sa con­cen­tra­tion – jusqu’à en épouser la durée, plénière : A l’étale est le poème d’une vie, en bien des sens – une vie entière, non sans héroïsme, con­fiée au poème. Et, à sa manière, une réponse – à notre temps : la parole, en son amour infi­ni –  comme ressource essen­tielle, comme joie, comme avenir.

 

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