Sec­ond opus de cette revue qui affirme sa  présence sin­gulière dès le pre­mier regard. Couleurs, direc­tion artis­tique, et promesse d’un con­tenu édi­to­r­i­al remar­quable car représen­tatif du vivi­er créatif des « deux rives de la Méditer­ranée ». Editée en Corse par Jean-Jacques Colon­na d’Istria et les édi­tions Scu­do, I Vagabon­di est une revue de grand for­mat  ouverte sur les arts et les cul­tures, qui, “dans la planète cul­turelle de l’île vient ain­si com­pléter  la renais­sance du genre », «avec les revues « Qui » «  Musanos­tra » et «  Lit­ter­atu­ra », plus « lit­téraires » que « visuelles » qui « font de la Corse une région à la pointe de la créa­tion, qu’elle soit écrite ou imagée. » 

Ce sec­ond vol­ume abor­de les thèmes de la sex­u­al­ité en Méditer­ranée, et celui du respect de la nature, présen­tés par jean-Jacques Colon­na d’s­tria dans son édito :

Dans cette nou­velle livrai­son, il n’est plus ques­tion de Fes­ti­val Romain Gary que la coro­n­avirus a emporté, mais il reste la Méditer­ranée au cen­tre des débats, avec deux thèmes récur­rents, éter­nels et donc bien actuels… Le pre­mier plébisc­ité par les jeunes lecteurs — on s’en doutera :  « la sex­u­al­ité ». Le sec­ond, par d’autres, peut-être « moins jeunes », encore que… :  « Le respect de la nature », ce dernier thème nous ayant paru être une évi­dence, sus­citée par une cita­tion emprun­tée au mag­nifique philosophe Mar­cel Conche extraite de son  essai  « La nature et l’homme » paru  aux édi­tions «  Les Cahiers de l’Egaré » en avril dernier :  «  le respect n’est pas dû seule­ment aux humains mais à tout ce qui vit y com­pris le ver de terre ». 

I Vagabon­di — Revue de créa­tion des deux rives de la Méditer­ranée — Scu­do Edi­tions, Hiv­er 2021/2022, 168 pages, 15 € — ver­sion numérique disponible sur le site de l’édi­teur à 8 € : https://www.scudoedition.corsica/product-page/i‑vagabondi-n-2-numérique

 Si l’esprit du pre­mier numéro s’est en effet ouvert à de nou­veaux espaces et de nou­veaux thèmes, il s’est enrichi grâce à la par­tic­i­pa­tion de créa­teurs venus de « l’extérieur » à la Corse, notam­ment avec le romanci­er turc Nédim Gürsel, le jour­nal­iste ital­ien Alessan­dro Micheluc­ci, la provençale Mar­i­lyne Bertonci­ni, l’andalouse Rosa Romo­jaro … La créa­tion graphique n’a pas échap­pé à cette ouver­ture grâce à l’artiste roumaine Karin Guni, à l’algérien Rachid Koraïchi, à la pho­tographe Mathilde Col­lot, retirée en Ital­ie ou encore à Julien Blaine, tou­jours fidèle au Moulin de Ventabren.

Il est clair que cette revue de créa­tion se veut le lieu d’un syn­crétisme artis­tique et cul­turel. Il sem­ble que cette sec­onde livrai­son l’af­firme bien plus évidem­ment que la pre­mière, et peut-être est-ce ce qui motive ces quelques lignes au début de l’édi­to de Jean-Jacques Colon­na D’Is­tria  “Ou bien ce deux­ième numéro qui aura été le sec­ond, aura sus­cité chez le lecteur l’envie d’en lire une troisième livrai­son, voire une qua­trième, puis encore une autre… ou bien ce numéro sera bien le sec­ond et donc le dernier parce que l’élan sus­cité par le pre­mier envoi n’a pas tenu ses promess­es. Gageure donc que d’oser un nou­v­el envoi avec ce numéro 2  de I VAGABONDI. Les lecteurs jugeront…”.

Pas de crainte, c’est une très belle pub­li­ca­tion qui pro­pose une cinquan­taine d’artistes, plas­ti­ciens, poètes, auteur-e‑s, pluridis­ci­plinaires et de nation­al­ités dif­férentes. L’écrit, qui laisse une large place aux auteurs cors­es, Nor­bert Paganel­li, Eti­enne Per­fet­ti, Dominique Ottavi, Saveriu Valen­ti­ni, Marc Giu­di­cel­li, Tina Bar­toli, Dominique Pietri, Guy de Com­piègne, Vic­tor Cabras,  Pedru Cuneo-Orlan­duc­ci, Antone Mariel­li ou Saveriu Valentini… 

Mais ain­si que le souligne le directeur de la pub­li­ca­tion dans son édi­to “« l’image », le « visuel »”, occupe une place prépondérante, “puisque I VAGABONDI se pro­pose d’être un creuset, celui de la créa­tion artis­tique sous toutes ses formes, celui d’artistes vivant en Corse comme Orso, Toni Casa­lon­ga, Agnès Accor­si, Julien Osty, Françoise Ser­ièys, Arlette Shleifer, Mario Sépul­cre, Lin­da Calderon, Françoise Per­bet-Savel­li, Jean-Pierre Savel­li ou encore Vin­cent Milelliri…”

De plas­ti­ciens déjà pub­liés dans le N°1 de la revue  comme Xavier Dan­doy de Casabi­an­ca, Julien Blaine, Mohamed Almadaoui, Dominique Appi­et­to, Jean Tor­re­grosa, Aris­tide Nerrière, Marc Colon­na d’Istria, Lora K…, mais aus­si “de jeunes créa­teurs enfin comme Marie-Ange Fil­ip­pi, Mar­i­on Strom­boni, Estelle Petit, l’indéprimeuse, et Lau­re Fil­ip­pi” ou encore Mar­i­lyne Bertonci­ni  se mêlent et don­nent à la glob­al­ité créée une tonal­ité unique et irremplaçable.

Ain­si, au fil des pages dépose ou de poésie, le thème est décliné en duo ou en solo comme l’ar­ti­cle de Xavier dandy de Casablan­ca, “Prélude à une poésie visuelle” ou encore cette pub­li­ca­tion, texte et images, de Mar­i­lyne Bertonci­ni, Minotaur/A(riane), dont les pho­tos sou­ti­en­nent un long poème dédié au désir féminin imprimé en let­tres blanch­es sur ses pho­tos d’é­corce, de troncs, de bois dont les linéa­ments et les cir­con­vo­lu­tions illus­trent par­faite­ment les entrelacs de nos incon­scients, la poten­tial­ités poly­phoniques du poème qui dévoile des couch­es séman­tiques inédites et tou­jours renou­velées, et la thé­ma­tique du numéro en liant ce désir à l’élan vital de la nature. 

Mohamed Amadaoui et Karin Guni, Saveiru Valen­ti­ni, Marc Colon­na d’Is­tria, et tant de noms, 52 au total qui se suc­cè­dent dans un tour­bil­lon de visuels haute­ment mis en valeur, en couleur, en page. 

Des rubriques per­ma­nentes struc­turent égale­ment l’ensem­ble, comme par exem­ple  “Le Feuil­leton” d’Aris­tide der­rière,  qui renoue avec la tra­di­tion du roman feuil­leton des pre­miers péri­odiques en pro­posant un texte fric­tion­nel en prose qui paraît en épisodes successifs. 

Belle réus­site donc pour ce sec­ond vol­ume. Si le pre­mier a per­mis de con­naître cette nou­velle venue le sec­ond numéro affirme haut et fort une iden­tité qui place décidé­ment I Vagabon­di dans le groupe des” grandes” — enten­dons par grandes ces pub­li­ca­tions qui ne s’i­den­ti­fient qu’à ce puis­sant désir d’af­firmer une exis­tence pro­pre sans rien sac­ri­fi­er à une appar­te­nance générique ou artis­tique prédéfinie. La valeur n’at­tend pas le nom­bre des années… 

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Carole Mesrobian

Car­ole Car­cil­lo Mes­ro­bian est poète, cri­tique lit­téraire, revuiste, per­formeuse, éditrice et réal­isatrice. Elle pub­lie en 2012 Foulées désul­toires aux Edi­tions du Cygne, puis, en 2013, A Con­tre murailles aux Edi­tions du Lit­téraire, où a paru, au mois de juin 2017, Le Sur­sis en con­séquence. En 2016, La Chou­croute alsa­ci­enne paraît aux Edi­tions L’âne qui butine, et Qomme ques­tions, de et à Jean-Jacques Tachd­jian par Van­i­na Pin­ter, Car­ole Car­ci­lo Mes­ro­bian, Céline Delavaux, Jean-Pierre Duplan, Flo­rence Laly, Chris­tine Tara­nov,  aux Edi­tions La chi­enne Edith. Elle est égale­ment l’au­teure d’Aper­ture du silence (2018) et Onto­genèse des bris (2019), chez PhB Edi­tions. Cette même année 2019 paraît A part l’élan, avec Jean-Jacques Tachd­jian, aux Edi­tions La Chi­enne, et Fem mal avec Wan­da Mihuleac, aux édi­tions Tran­signum ; en 2020 dans la col­lec­tion La Diag­o­nale de l’écrivain, Agence­ment du désert, paru chez Z4 édi­tions, et Octo­bre, un recueil écrit avec Alain Bris­si­aud paru chez PhB édi­tions. nihIL, est pub­lié chez Unic­ité en 2021, et De nihi­lo nihil en jan­vi­er 2022 chez tar­mac. A paraître aux édi­tions Unic­ité, L’Ourlet des murs, en mars 2022. Elle par­ticipe aux antholo­gies Dehors (2016,Editions Janus), Appa­raître (2018, Terre à ciel) De l’hu­main pour les migrants (2018, Edi­tions Jacques Fla­mand) Esprit d’ar­bre, (2018, Edi­tions pourquoi viens-tu si tard), Le Chant du cygne, (2020, Edi­tions du cygne), Le Courage des vivants (2020, Jacques André édi­teur), Antholo­gie Dire oui (2020, Terre à ciel), Voix de femmes, antholo­gie de poésie fémi­nine con­tem­po­raine, (2020, Pli­may). Par­al­lèle­ment parais­sent des textes inédits ain­si que des cri­tiques ou entre­tiens sur les sites Recours au Poème, Le Cap­i­tal des mots, Poe­siemuz­icetc., Le Lit­téraire, le Salon Lit­téraire, Décharge, Tex­ture, Sitaud­is, De l’art helvé­tique con­tem­po­rain, Libelle, L’Atelier de l’ag­neau, Décharge, Pas­sage d’en­cres, Test n°17, Créa­tures , For­mules, Cahi­er de la rue Ven­tu­ra, Libr-cri­tique, Sitaud­is, Créa­tures, Gare Mar­itime, Chroniques du ça et là, La vie man­i­feste, Fran­copo­lis, Poésie pre­mière, L’Intranquille., le Ven­tre et l’or­eille, Point con­tem­po­rain. Elle est l’auteure de la qua­trième de cou­ver­ture des Jusqu’au cœur d’Alain Bris­si­aud, et des pré­faces de Mémoire vive des replis de Mar­i­lyne Bertonci­ni et de Femme con­serve de Bluma Finkel­stein. Auprès de Mar­i­lyne bertonci­ni elle co-dirige la revue de poésie en ligne Recours au poème depuis 2016. Elle est secré­taire générale des édi­tions Tran­signum, dirige les édi­tions Oxy­bia crées par régis Daubin, et est con­cep­trice, réal­isatrice et ani­ma­trice de l’émis­sion et pod­cast L’ire Du Dire dif­fusée sur radio Fréquence Paris Plurielle, 106.3 FM.