uma aldeia por entre a névoa
da madrugada
a luz do poste elétrico
fundida
diante da paisagem
repouso o meu peito
espre­i­tan­do à janela
as figurações
dum quase morte em chama
do que ain­da tem pulsação
à procu­ra do que é seu
ou dum
alguém
(difu­so
etéreo)
só pó
só recordação

un hameau dans la brume
à l’aurore
la lumière du poteau électrique
en fusion
dans le paysage
j’apaise ma poitrine
penchée à la fenêtre
la figuration
d’une qua­si-mort en flammes
où bat encore une pulsation
à la recherche de ce qui est soi
ou d’un ailleurs
(dif­fus
éthéré)
à peine poussière
à peine souvenir

∗∗

luz­in­has bril­ham inter­mi­tentes na noite
sinal­izam a solidão
dessa aldeia pes­soal e intransferível
quan­tos milénios foram precisos
para achar­mos o nos­so lugar
o pedaço de ter­ra que é nos­so por inteiro?

habita­mos uma casa
com grandes sacadas
para out­ras casas

les clartés clig­no­tent dans la nuit
égrenant la solitude
de ce hameau per­son­nel et intransmissible
com­bi­en de mil­lé­naires furent nécessaires
pour ren­con­tr­er notre place
le morceau de terre qui est nôtre en intégralité
c’est là
que nous habitons une demeure
aux vastes balcons
ouverts sur d’autres demeures

∗∗

 

há morte mui­ta morte
nos gestos
no ventre
na fundura
que não alcanço
porque me deten­ho dobrada
sobre a infância
todos os dias
remem­o­ro o estio
com­bat­e­mos sempre
donde desertámos
o cor­po é o caudal
nas min­has mãos
as fissuras

il y a abon­dance de mort
dans les gestes
dans le ventre
dans l’abîme
auquel je n’accède pas
parce que je me fige repliée
sur l’enfance
chaque jour
je me remé­more l’été
nous com­bat­tons toujours
là où nous désertons
le corps est le torrent
dans mes mains
les crevasses

∗∗

 

ousara ser simples
como o vento
que pas­sa pela árvore
e a agi­ta suavemente
insondáv­el é
o movi­men­to dela
aden­tran­do no real
talvez eu habite
no inte­ri­or do tronco
e me vá alteando
sem ciência
e assista ao baile de duas vespas
ao acasala­men­to de dois pirilampos
à mater­nidade do ninho
à mul­ti­tude da cor
ao voo sem retorno
à beleza
por si só

osera-t-elle être simple
comme le vent
qui caresse l’arbre
insond­able demeure
son mouvement
s’incrustant dans le réel
peut-être habité-je
au cœur du tronc
et vais-je me hissant
pau­vre de science
et assisté-je au bal de deux guêpes
aux noces de deux vers luisants
à la mater­nité du nid
à la plu­ral­ité de la couleur
au vol sans retour
à la beauté pour elle-même

∗∗

vol­ta um pen­sa­men­to de amor
ao coração cansado
num cor­po que não recorda
a sua eternidade
o homem que sonha
extravasa as costuras
resvala sobre out­ro corpo
sutu­ra e perscruta
é o vento
cam­in­ha até à fé
e cimen­ta a beleza,
vol­ta um pen­sa­men­to de amor
que fixa sobre o cume
o nome que damos às coisas
som­brio e intocável
à margem do que suspeitamos
ser ain­da mais belo

ressur­git une pen­sée d’amour
dans le cœur épuisé
qui a oublié
son éternité
l’homme qui rêve
déchire ses coutures
dévale sur un autre corps
suture et scrute
il est le vent
il marche dans la foi
et cimente la beauté,
ressur­git une pen­sée d’amour
qui pro­jette à la cime
le nom que nous don­nons aux choses
som­bre et intouchable
en marge de ce que nous suspectons
être encore plus beau

∗∗

 

os cor­pos se atraem
antes de qual­quer sabedoria
os sen­ti­dos se apuram
para a grande madrugada
mas a mente trai
e o medo trucida
todo e qual­quer pen­sa­men­to de amor
somos menores
não nos atrevemos
per­ante o precipício
as más­caras não nos per­mitem voar

les corps s’attirent
précé­dant toute sagesse
les sens s’apurent
pour la grande aurore
mais l’esprit trahit
et la peur assassine
toute et cha­cune pen­sée d’amour
nous sommes mineurs
et n’osons défier
le précipice
les masques nous empêchent de voler

∗∗

 

a vénus faz dançar as labaredas
sobre o cor­po amado
a vénus faz rever­ber­ar as ervas
e espra­iar o espanto
a vénus faz pare­cer simples
amar
a vénus fun­da uma alegoria
de vida após vida
– o que pode uma vénus
rodea­da pelo (próprio) fogo?
ninguém sabe
mas o dese­jo sem­pre inventa
um porto
onde anco­ram muito barcos
mil­hares de almas

Vénus fait danser les flammes
sur son corps aimé
Vénus fait réver­bér­er les herbes et répan­dre l’horreur
Vénus fait croire qu’il est facile
d’aimer
Vénus fonde une allégorie
de la vie après la vie
– mais que peut une Vénus
encer­clée par le feu même?
per­son­ne ne le sait
mais le désir tou­jours invente
un port
où ancr­er nom­bre vaisseaux
des mil­liers d’âmes

∗∗

os pés pisam a erva
e o meu olhar se espraia
num tem­po dobran­do o tempo
sou uma cri­ança que perscruta
a pul­sação do ínfimo
agrego-me multiplico-me
à agi­tação dos ani­mais e das crianças
caio de amores pelo indivisível
apro­prio-me da fragân­cia das flores
e par­to em bus­ca do vento
que me tra­ga de novo
a esta imagem
que eu sei de cor

les pieds foulent l’herbe
et mon regard s’éparpille
dans un temps pli­ant le temps
je suis une enfant qui scrute
la pul­sa­tion de l’infime
je m’agrège me multiplie
dans la tur­bu­lence des ani­maux et des enfants
je meurs d’amour pour l’indicible
je m’approprie la fra­grance des fleurs
et pars en quête du vent
qui m’offre à nouveau
cette image
que je sais par cœur

∗∗

o azul das tardes
remon­ta ao oriente
dum pensamento
sou toda escu­ta e visão
a min­ha cabeça é um cosmos
dos olhos escorrem-me
pos­síveis sinais de infinito
não quero ser excelsa
mas trans­bor­dam em mim
as cores que ain­da não vemos
ain­da assim pressentimos
estou no meio dos homens
– sou o silêncio

l’azur des après-midi
s’affiche à l’orient
d’une pensée
je suis pure écoute et vision
ma tête est un cosmos
de mes yeux coulent
des sig­naux pos­si­bles de l’infini
je ne veux pas être sublime
mais débor­dent en moi
les couleurs que nous ne vîmes pas encore
bien que nous les pressentions
je vis au milieu des humains
– je suis le silence

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Carole Mesrobian

Car­ole Car­cil­lo Mes­ro­bian est poète, cri­tique lit­téraire, revuiste, per­formeuse, éditrice et réal­isatrice. Elle pub­lie en 2012 Foulées désul­toires aux Edi­tions du Cygne, puis, en 2013, A Con­tre murailles aux Edi­tions du Lit­téraire, où a paru, au mois de juin 2017, Le Sur­sis en con­séquence. En 2016, La Chou­croute alsa­ci­enne paraît aux Edi­tions L’âne qui butine, et Qomme ques­tions, de et à Jean-Jacques Tachd­jian par Van­i­na Pin­ter, Car­ole Car­ci­lo Mes­ro­bian, Céline Delavaux, Jean-Pierre Duplan, Flo­rence Laly, Chris­tine Tara­nov,  aux Edi­tions La chi­enne Edith. Elle est égale­ment l’au­teure d’Aper­ture du silence (2018) et Onto­genèse des bris (2019), chez PhB Edi­tions. Cette même année 2019 paraît A part l’élan, avec Jean-Jacques Tachd­jian, aux Edi­tions La Chi­enne, et Fem mal avec Wan­da Mihuleac, aux édi­tions Tran­signum ; en 2020 dans la col­lec­tion La Diag­o­nale de l’écrivain, Agence­ment du désert, paru chez Z4 édi­tions, et Octo­bre, un recueil écrit avec Alain Bris­si­aud paru chez PhB édi­tions. nihIL, est pub­lié chez Unic­ité en 2021, et De nihi­lo nihil en jan­vi­er 2022 chez tar­mac. A paraître aux édi­tions Unic­ité, L’Ourlet des murs, en mars 2022. Elle par­ticipe aux antholo­gies Dehors (2016,Editions Janus), Appa­raître (2018, Terre à ciel) De l’hu­main pour les migrants (2018, Edi­tions Jacques Fla­mand) Esprit d’ar­bre, (2018, Edi­tions pourquoi viens-tu si tard), Le Chant du cygne, (2020, Edi­tions du cygne), Le Courage des vivants (2020, Jacques André édi­teur), Antholo­gie Dire oui (2020, Terre à ciel), Voix de femmes, antholo­gie de poésie fémi­nine con­tem­po­raine, (2020, Pli­may). Par­al­lèle­ment parais­sent des textes inédits ain­si que des cri­tiques ou entre­tiens sur les sites Recours au Poème, Le Cap­i­tal des mots, Poe­siemuz­icetc., Le Lit­téraire, le Salon Lit­téraire, Décharge, Tex­ture, Sitaud­is, De l’art helvé­tique con­tem­po­rain, Libelle, L’Atelier de l’ag­neau, Décharge, Pas­sage d’en­cres, Test n°17, Créa­tures , For­mules, Cahi­er de la rue Ven­tu­ra, Libr-cri­tique, Sitaud­is, Créa­tures, Gare Mar­itime, Chroniques du ça et là, La vie man­i­feste, Fran­copo­lis, Poésie pre­mière, L’Intranquille., le Ven­tre et l’or­eille, Point con­tem­po­rain. Elle est l’auteure de la qua­trième de cou­ver­ture des Jusqu’au cœur d’Alain Bris­si­aud, et des pré­faces de Mémoire vive des replis de Mar­i­lyne Bertonci­ni et de Femme con­serve de Bluma Finkel­stein. Auprès de Mar­i­lyne bertonci­ni elle co-dirige la revue de poésie en ligne Recours au poème depuis 2016. Elle est secré­taire générale des édi­tions Tran­signum, dirige les édi­tions Oxy­bia crées par régis Daubin, et est con­cep­trice, réal­isatrice et ani­ma­trice de l’émis­sion et pod­cast L’ire Du Dire dif­fusée sur radio Fréquence Paris Plurielle, 106.3 FM.